Plateforme commune : hospitalisation sans consentement – Syndicat des Avocats de France – Syndicat de la Magistrature – Union Syndicale de la Psychiatrie

La politique sécuritaire menée pendant plus de dix ans a eu des effets jusque dans le domaine des soins psychiatriques : de 2006 à 2011, les hospitalisations sous contrainte ont augmenté de plus de 50 % ! Le Syndicat de la Magistrature, le Syndicat des Avocats de France et l’Union Syndicale de la Psychiatrie accueillent avec intérêt le rapport d’étape de Monsieur Denys Robilliard relatif aux soins sans consentement. Le point de vue sécuritaire n’est plus prévalent et un équilibre semble s’instaurer entre protection des libertés et exercice d’une contrainte. Les organisations signataires entendent faire connaître leur position sur 6 points essentiels. Le moment du contrôle par le JLD Le maintien du préfet comme autorité susceptible de prendre une décision de privation de liberté constitue une « exception française » dans le paysage judiciaire européen qui n’est pas justifiée. Cette décision doit relever de la seule autorité judiciaire, gardienne des libertés individuelles, et des modalités d’examen en appel à bref délai doivent être définies.
Les organisations signataires se félicitent néanmoins du progrès significatif que constitue l’intervention du JLD dès le 5ème jour.
Elles estiment par ailleurs nécessaire d’envisager un réexamen de la situation du malade hospitalisé sous contrainte dans un délai raisonnable qui ne saurait excéder trois mois. La meilleure prise en compte de la liberté des personnes par la proposition faite de ramener le délai de contrôle à 5 jours n’aura pas une incidence très importante en termes de moyens humains puisque le nombre de dossiers supplémentaires est évalué à environ 20%, ce qui représente au plus 5 ou 6 postes de magistrats et autant de greffiers. L’audience Les organisations signataires sont satisfaites que le rapport retienne le principe de la tenue de l’audience au sein de l’établissement hospitalier. Cela suppose bien évidemment que soient aménagés de véritables « lieux de justice » clairement identifiés au sein de ces établissements.
Mais telle qu’elle est formulée la proposition n°11 s’avère insuffisante. En effet, permettre au JLD de tenir l’audience au palais de justice si l’affaire le nécessite, par une décision insusceptible de recours, revient à priver de toute effectivité le principe posé.
Il ne peut s’agir d’une simple mesure d’administration judiciaire. La décision de déroger au principe devra être impérativement motivée au regard des circonstances particulières de l’espèce et susceptible de recours avec la décision au fond.
Quant au recours à la visio-conférence, il doit être exclu. La présence de l’avocat La présence de l’avocat obligatoire est une nécessité absolue dans ce genre de contentieux. Cela permettra un meilleur accès au juge et au dossier, ce qui garantira une meilleure défense. Il est indispensable que l’avocat soit prévenu par le greffe dès que le dossier est enregistré.
Une défense effective de qualité suppose une rémunération convenable de l’avocat. Il est donc indispensable de réévaluer le montant alloué aux avocats au titre de l’aide juridictionnelle dans le cadre de ces procédures. Le mineur Le mineur ne doit pas être oublié.
Dès lors qu’il y a contrainte, qu’elle s’exerce à l’encontre d’un majeur ou d’un mineur, la règle du contrôle judiciaire doit trouver à s’appliquer. Il est donc nécessaire de réfléchir aux modalités de mise en œuvre de ce contrôle judiciaire compte tenu de la spécificité de la procédure liée à la situation de minorité et à l’exercice de l’autorité parentale. Le régime dérogatoire (UMD –Irresponsabilité pénale) Les organisations signataires accueillent favorablement la fin de la stigmatisation de certaines catégories de malades et l’abandon des dispositions du régime particulier pour les malades séjournant ou ayant séjourné en UMD, et pour la plupart des malades ayant fait l‘objet d’une décision d’irresponsabilité pénale. Il s’agit d’une réponse satisfaisante suite à la décision du Conseil constitutionnel du 20 avril 2012. Les soins ambulatoires Si des soins sous contrainte en ambulatoire devaient être maintenus, ils ne pourraient avoir lieu que dans des lieux de soins parfaitement définis, excluant en particulier le domicile des personnes, et devraient bénéficier du contrôle systématique par le JLD. Au-delà de la grande loi de santé mentale attendue par les professionnels depuis de nombreuses années, il est indispensable que cette réforme de la loi du 5 juillet 2011 aboutisse et que les personnes hospitalisées sous contrainte soient à nouveau considérées comme des malades et non comme des délinquants potentiels.
Parallèlement, et au regard notamment de la forte disparité constatée dans la mise en œuvre et la poursuite de la contrainte, quelle que soit sa forme – hospitalisation, soins ambulatoires, contention, isolement – selon les régions, les juridictions, les équipes de secteur/services de psychiatrie, les organisations signataires demandent la création d’un observatoire national des contraintes.

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