Synthèse offres de soins : proposition et commentaires de l’USP

Suite à la proposition de synthèse…

Si l’USP relève quelques propositions intéressantes, notamment la reconnaissance et la réaffirmation de la politique de secteur, il apparaît qu’aucune leçon n’est tirée des politiques passées, qu’aucun travail n’est proposé pour analyser les véritables causes de la catastrophe notamment en terme de gouvernance, d’inflation d’une bureaucratie couteuse (du compte et recompte) et destructrice puisqu’elle priorité ses résultats, la course aux chiffres plus que le soin et la relation, une gouvernance inadaptée puisqu’elle donne un pouvoir exclusif à cette dernière, un management agressif, un formatage des pratiques (cf les motions du dernier congrès de l’usp notamment : financement et destruction de la psychiatrie , non à la psychiatrie d’état , pour une loi cadre  et les proposition du 19/5 pour la CNP).

Sans l’intervention de mesures fortes sur ces aspects qui interviennent évidemment dans l’attractivité, nous ferons le constat sous peu d’une poursuite de la dégradation du service public de psychiatrie, une augmentation de la violence, de la fuite des soignants de tout statut, des patients qui en auront le choix, donnant ainsi une opportunité de continuer la bascule des soins psychiatriques vers le privé.  Les «  chèques emploi-service » de psychologues, quelques séances au rabais etc. ne suffiront pas.

Par ailleurs, la collaboration publique/privé doit prendre en compte l’inégalité d’exercice concernant le choix des patients et garantir quoi qu’il en soit un dispositif public solide, notamment en incluant le dispositif des centres pluriprofessionnels de santé.

L’USP ne souhaite pas que soient mises en avant les équipes mobiles qui, le plus souvent, ont vu le jour par méconnaissance de la politique de secteur (continuité, globalité) ou pour rechercher un financement au non d’une prétendue innovation. Ces équipes ne peuvent être qu’une émanation du secteur et y être pleinement articulées pour éviter des strates supplémentaires dans les prises en charge, facteur de discontinuité et d’incohérence.

Les consultation téléphoniques et en visio ne peuvent se substituer à la rencontre. Leur mise en avant peut par ailleurs interrompre le processus de repeuplement, de présence effective d’une équipe pluri-professionnelle de proximité.

L’USP demande à en finir avec des financements directifs (3): un financement populationnel, l’arrêt de la surspécialisation, facteur de discontinuité et d’élimination (par choix de patients) et le repeuplement en psychiatres sont suffisant pour favoriser de fait et en toute cohérence l’ambulatoire.

La formation doit respecter la diversité des modèles et des pratiques. Les ARS et les universités doivent être responsabilisées notamment pour les stages d’internes sur les secteurs.

Il est utile de valoriser la fonction de chef de secteur mais en revoyant la gouvernance (y compris élection du chef de pôle par ses pairs).

pour retrouver la proposition de synthèse originale en pdf

PROPOSITIONS SYNTHESE :

1) Organisation générale de l’offre de soins 

Assurer une offre de prévention et de soins généraliste en psychiatrie sur l’ensemble du territoire selon les principes de la politique de secteur : 

En précisant clairement les responsabilités institutionnelles selon le schéma ci-joint tout en veillant à leur coordination (Cf Annexe 1). Dans cette perspective la structuration et la pérennisation de l’action des acteurs du Projet Territorial de Santé Mentale (PTSM) doit être formalisée selon des modalités propres à chaque territoire. Dans cette perspective les Agences Régionales de Santé favorisent la mise en place de dispositifs de type Communautés Psychiatriques de Territoire (CPT). Les responsables médicaux des établissements publics autorisés en psychiatrie veilleront en particulier à la cohérence des projets médicaux (établissement, pôles) et du Projet Régional de Santé (PRS) avec le PTSM. 

Proposition :
Favoriser la mise en place des Communautés Psychiatriques de Territoire et veiller à la cohérence des PRS et PTSM. 

–  En adaptant l’organisation de l’offre à chaque territoire selon les réalités locales de l’offre de soins sur la base des travaux des PTSM (disponibilité des généralistes, offre privée, CMP, relations avec les autres acteurs via les CLSM, soins spécifiques et spécialisés, etc…). Une attention particulière sera portée à la participation des professionnels libéraux aux travaux du PTSM participant notamment aux dispositifs de type Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) ou maison de santé. Une acculturation réciproque sera favorisée dans le sens d’une hybridation progressive des fonctionnements. Des invitations réciproques aux instances type CME seront proposées. De la même manière les professionnels des hôpitaux de proximité seront sollicités dans la même intention. 


–  Les Conseils Locaux de Santé Mentale (CLSM) gagneront à être élargis à l’ensemble des questions de santé publique concernant les communes ou l’intercommunalité sous la forme de Conseils Locaux de Santé. Le financement du volet psychiatrique du contrat local de santé sera maintenu. Enfin il pourrait être envisagé de rendre obligatoire la signature d’un tel contrat sur l’ensemble du territoire national. 


–  La rédaction de projets de secteur permettrait d’améliorer la pertinence des PTSM.


Sujet de moyen terme : 


– Approfondir les relations de complémentarité/ Subsidiarité entre les secteurs publics et privés. 

Propositions : 

–  Associer les professionnels libéraux et les CPTS au PTSM. 


–  Elargir les Conseils Locaux de Santé Mentale à l’ensemble des questions de santé publique. 


–  Systématiser les projets de secteur et rapports de secteur. Veiller à la bonne intégration du secteur privé dans les PTSM 


2) Lien avec la médecine de ville 

Une vigilance particulière sera portée en faveur d’un partenariat actif avec les CPTS ou maison de santé. Il est essentiel d’organiser et de structurer les liens entre les secteurs de psychiatrie générale et infanto-juvénile et l’ensemble des acteurs sanitaires des dispositifs de soins. A ce titre il faut rappeler le rôle de premier partenaire sanitaire des médecins généralistes dans la prise en charge de l’ensemble de la santé des personnes sur un territoire donné. L’organisation des soins de première ligne, autour des généralistes, via la constitution de Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), constitue une opportunité pour le secteur. Resserrer les liens entre les CPTS et le secteur permettrait de mieux assurer le suivi somatique des patients psychiatriques tout en facilitant les dépistages précoces et le rendu d’avis psychiatrique pour les patientèles suivies en ville. 

Propositions : 

Il est donc nécessaire de renforcer les liens avec les CPTS par une action volontariste en faveur de la psychiatrie et de la santé mentale notamment par des moyens dédiés auprès des structures de secteur, par exemple par le financement de fonctions de coordination (infirmiers, …) ainsi que par la participation et le renforcement de la mobilité des équipes de secteur ou la création d’équipes mobiles thématiques (personnes âgées, psychiatrie infanto-juvénile de l’enfant et de l’adolescent, précarité,…), qui contribuent de façon déterminante à la réduction des délais diagnostics et à la prévention des rechutes et des réhospitalisations. 

3) Les Centres Médico-Psychologiques (CMP) 

Pour ce qui concerne les CMP, les modalités d’accueil y sont diversifiées à partir d’un cahier des charges défini au niveau national favorisant les accueils infirmiers et les prises en charge psychologiques avec régulation médicale. La mobilité des professionnels (équipe dédiée ou à partir de CMP) en articulation avec les autres acteurs territoriaux est assurée pour favoriser notamment les actions de prévention secondaire (précocité des soins, prévention des rechutes…). Des formations complémentaires adaptées et une meilleure lisibilité des responsabilités engagées sont assurées. 

L’expérience montre que le développement de la capacité d’accueil et d’« aller vers » produit une réduction des délais diagnostics, améliore le dépistage et le traitement des rechutes et réduit les besoins en hospitalisation temps plein. Le renforcement de la mobilité des équipes de secteur que ce soit par téléphone (équipement en téléphone portable), par visio-conférence (équipement en web- cam, e-santé) ou en se déplaçant (véhicules de secteur) voire par la création d’équipes mobiles « de secteur » étroitement articulées avec les équipes de CMP et hospitalières 

Proposition :
Préciser les attendus des CMP au niveau national prévoyant la diversité des modalités d’accueil (accueils infirmiers et/ou psychologiques) ainsi que le renforcement d’intervention à domicile (téléphone, télémédecine, mobilité des équipes). 

Proposition :
Dans le cadre de la réforme du financement, prévoir une reconnaissance financière de l’aller vers et des prises en charge intensives ambulatoires. 

4) Les formations 

Les formations initiales actuelles, que ce soit celles des aide-soignants, des infirmiers, des psychologues, des cadres soignants et des médecins ne permettent pas de disposer à leur issue d’une compétence suffisante en psychiatrie. Les formations initiales doivent être revues dans cette optique. Les stages en psychiatrie doivent être plus accessibles, la création d’un internat en psychologie mis à l’étude. La formation des psychiatres aux psychothérapies doit être, pendant le DES, complétée ou créée. 

Propositions : 

–  Pour les aide-soignants, des groupes de parole doivent leur être proposés pour élaborer les aspects relationnels rencontrés dans leurs stages. 


–  Pour les infirmiers, les stages en psychiatrie doivent être regroupés et prolongés, les compétences horizontales en matière de communication doivent être développées, l’enseignement de la psychiatrie doit être renforcé. 


–  Pour les psychologues, leurs études doivent comporter pour ceux qui se destinent au travail en psychiatrie et en santé mentale un apprentissage de la sémiologie psychiatrique, ainsi qu’un temps de stage dans un service de psychiatrie et qu’une formation à la coopération en psychiatrie (déontologie, etc…). 


–  Les études de médecine doivent comporter un stage obligatoire en psychiatrie, ainsi qu’une sensibilisation à la relation médecin-malade. 


–  Les futurs généralistes doivent pendant leur DES faire au minimum un stage à temps partiel en psychiatrie consacré à l’apprentissage de la sémiologie psychiatrique et à la connaissance de l’organisation des soins en psychiatrie. 


–  Pour les cadres soignants, leur année de formation doit inclure un module de spécialisation en psychiatrie comprenant des approfondissements cliniques et une formation au travail en petit groupe. 
Les fonctions assurées par l’ensemble de ces professionnels en psychiatrie seront valorisées et développées par des formations complémentaires qui doivent être organisées et généralisées pour tous ces métiers. Le bilan social des établissements et la certification HAS doivent en suivre la mise en place. 
L’accueil des IPA dans les services nécessitera également des adaptations de l’organisation des soins afin de prendre en compte leurs missions nouvelles. 
La création de nouveaux métiers est à envisager comme une spécialisation en psychiatrie après des formations initiales/tronc commun. Par exemple les aide-soignants expérimentés pourraient devenir « accompagnateurs en psychiatrie » après un an de formation en cours d’emploi éventuellement étalée sur deux ans (Cf Annexe 2), les infirmiers et les assistants sociaux à partir de leur expérience de suivi au long cours de malades psychiatriques pourraient devenir « gestionnaires de parcours de soins ». 
Par ailleurs, les infirmières « ASALEES », qui on fait leur preuve dans d’autres pathologies, pourraient étendre leurs interventions à la psychiatrie. Elle pourrait travailler auprès de généralistes, avec la supervision d’un psychiatre. 
Propositions : 


– Valorisation des fonctions de chef de service et de chef de pole et systématisation des formations qui s’y rattachent. 

5) Eclairer les choix organisationnels et financiers de l’offre de soins en psychiatrie sur la base des données de preuves et d’un étayage fort par des travaux sur la qualité des soins et la recherche médico économique en psychiatrie. 

Pour ce faire : favoriser la production d’états des connaissances sur les pratiques et les organisations de soins dans des domaines d’intérêt largement partagés et la production des recommandations de bonnes pratiques ; soutenir les travaux d’évaluation des pratiques cliniques et des dispositifs innovants et la recherche en implémentation qui n’existe pratiquement pas en France, au travers d’AAP ciblés et de la priorisation de la psychiatrie dans les AAP existants (PHRC, PREPS, …). 

Proposition : 

Soutenir financièrement et en ressources humaines à l’échelon national la production de connaissances dans le domaine médico-économique et de la qualité des soins. 

Pierre Paresys, vice-président

Delphine Glachant, Présidente